Les accords d'accompagnement jazz à deux mains
Le pianiste, de par le caractère "harmonique" de son instrument, est régulièrement amené à accompagner les autres musiciens dans un groupe de jazz. Lors de l'exposition du thème par une chanteuse ou pendant le chorus du saxophoniste par exemples, le piano joue pleinement son rôle d'instrument accompagnateur en jouant les accords de la grille correspondante.
Pour obtenir des accords d'accompagnement à quatre sons pour les deux mains au piano, il est utile d'appliquer quelques règles simples et efficaces que nous allons expliquer dans ce chapitre.
Construire un accord d'accompagnement
Nous allons prendre comme base de travail les accords à 4 sons sans fondamentales. Pour trouver un bon accord d'accompagnement, le principe de base est assez simple. Il faut jouer l'accord souhaité à 4 sons sans fondamentale à la main gauche et faire passer la deuxième note en partant de la gauche, "par dessus" autrement dit à droite de cet accord. Nous appellerons cela "ouvrir" l'accord. Pour commencer il est nécessaire de s'entrainer à jouer concrètement l'accord pour la main gauche seule avant de l'ouvrir en jouant cette deuxième note "au dessus" de l'accord, à la main droite. Cela simplifie la réflexion et évite beaucoup d'erreurs harmoniques.
Accords ouverts à 4 sons
Prenons en exemple un accord pour la main gauche de Do m7(9) 2ème renversement sans fondamentale à 4 sons : Sib Ré Mib Sol.
En accompagnement à deux mains, cet accord sera joué : Sib Mib Sol Ré.
Nous avons fait passer le Ré, deuxième note du premier accord, "par dessus" les trois premières notes qui restent jouées par la main gauche, la quatrième (le Ré) étant jouée désormais par la main droite. Cette nouvelle disposition est un accord d'accompagnement à quatre sons "ouvert" de Do m7 sans fondamentale.
L'harmonie est identique, mais le rendu sonore est plus "large" et correspond parfaitement à ce qui peut être joué pour accompagner par exemple une ou plusieurs mesures de chorus de saxophone sur un Do m7.
Cette formule d'accords d'accompagnement peut être utilisée pour tous les genres d'accords : mineur 7, majeurs 7, accords de 7eme, mineurs - majeurs 7.
Avec un accord de 7eme, la démarche est la même. Prenons un autre exemple avec l'accord de F7(9 13) : à la base pour la main gauche nous avons l'accord : La Ré Mib Sol, qui devient en accord d'accompagnement à deux mains : La Mib Sol Ré. Un dernier exemple avec l'accord de Sib Maj7 : pour la main gauche La Do Ré Fa devient La Ré Fa Do en accord d'accompagnement pour les deux mains.
Comment jouer les accords d'accompagnement à deux mains
L'accord une fois "ouvert" peut se jouer avec trois notes à la main gauche et une (celle qui est passée par dessus) avec la main droite. Il est aussi possible de partager ces quatre sons en deux : deux notes à la main gauche et les deux autres à la main droite.
Harmoniquement cela ne change rien. Au niveau du timbre de l'accord la deuxième solution est un peu plus homogène, bien que moins facile à réaliser lorsqu'on à pas encore l'habitude de pratiquer ces accords d'accompagnement.
Adapter les accords d'accompagnement
Lors de l'exposé d'une mélodie, les accords d'accompagnement doivent être au service de cette dernière. Il faut utiliser les accords ouverts avec discernement et en fin de compte toujours être à l'écoute du résultat sonore. Il est très risqué d'appliquer les principes expliqués dans ce chapitre de manière systématique. La note passée "au dessus" risque parfois de créer une dissonance avec celle du chant.
Dans la majorité des cas, c'est une trop grande proximité entre la note aigue de l'accord et celle du thème qui pose problème. Lorsque l'écart entre ces notes est d'un demi-ton ou d'un ton, il faut ajuster la plus aigue de l'accord.
Ex : C7 ouvert : Mi Sib Ré La lorsque la note du chant est Sol, cette association "La" et "Sol" crée une dissonance qui dans beaucoup de cas sera problématique.
La solution la plus simple est de changer la note aigue de l'accord. En l'occurrence le "La" peut devenir un "Sol" et nous aurons alors un unisson entre le chant et la partie haute de l'accord.
Idéalement l'accord (et sa note la plus aigue) doit être joué un peu plus grave que celle du chant, ou alors franchement plus aigu dans le cas où la mélodie est jouée par un autre instrument. Ce sont les tessitures proches qui peuvent créer des frottements harmoniques dissonants.